Dans le droit français, la notion de responsabilité pénale des personnes morales est un concept à la fois complexe et crucial dans la sphère juridique. Cette notion reflète l’idée qu’une entité, telle qu’une entreprise ou une association, peut être tenue pour responsable de certaines infractions pénales. Cette responsabilité se distingue de celle des personnes physiques qui sont les individus en tant que tels.
Les fondements de la responsabilité pénale des personnes morales
Le principe de personnalité des peines
La notion de responsabilité pénale des personnes morales est une dérogation au principe de personnalité des peines. En effet, selon l’article 121-1 du Code pénal, « Nul n’est responsable pénalement que de son propre fait ». Cependant, le deuxième alinéa de ce même article prévoit une exception à ce principe en affirmant que « Les personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement […] des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants »[1].
L’évolution législative
La responsabilité pénale des personnes morales a été introduite dans le droit français par la loi du 1er mars 1994[2]. Avant cette date, seules les personnes physiques pouvaient être tenues pour responsables d’infractions pénales. Cette évolution majeure a permis d’adapter le droit pénal à la réalité économique et sociale, où les personnes morales jouent un rôle de plus en plus important.
Les conditions de la responsabilité pénale des personnes morales
La nature des personnes morales concernées
Toutes les personnes morales de droit privé ou de droit public, à l’exception de l’État, peuvent voir leur responsabilité pénale engagée. Cela inclut les sociétés commerciales, les associations, les collectivités territoriales, etc.
La commission d’une infraction
Pour qu’une personne morale puisse être tenue pénalement responsable, il faut qu’une infraction ait été commise pour son compte par un de ses organes ou représentants. Cela signifie que l’infraction doit avoir été commise dans l’intérêt de la personne morale, par une personne ayant le pouvoir de l’engager.
Les conséquences de la responsabilité pénale des personnes morales
Les peines encourues
Les peines applicables aux personnes morales sont prévues par l’article 131-39 du Code pénal. Elles peuvent être de plusieurs types : amende, dissolution, interdiction d’exercer une activité professionnelle, placement sous surveillance judiciaire, etc.
La procédure pénale
La procédure pénale applicable aux personnes morales suit les mêmes règles que celle applicable aux personnes physiques, avec toutefois quelques spécificités. Par exemple, la personne morale est représentée devant la justice par son représentant légal.
Application de la responsabilité pénale
Avant qu’une personne morale ne soit reconnue coupable d’une infraction, le juge doit identifier l’organe ou le représentant qui, pour le compte de celle-ci, a commis l’infraction. Dans la plupart des cas, il s’agira d’une personne physique, comme le dirigeant ou le salarié disposant d’une délégation de pouvoir. Mais cet organe ou ce représentant peut également être une autre personne morale, comme une société qui préside celle faisant l’objet de poursuites3.
Statistiques sur la responsabilité pénale des personnes morales
En 2019, les personnes morales représentaient moins de 1 % des auteurs des affaires jugées par les tribunaux correctionnels. Sur les 4 200 personnes morales jugées, 14 % ont été déclarées non coupables, soit une part nettement supérieure à celle des personnes physiques (4 %). Les personnes morales jugées coupables ont été, quasi exclusivement, condamnées à une amende (98 %). Le montant médian des amendes prononcées à titre principal est de 2 969 euros, mais il peut atteindre 10 000 euros dans les cas d’une atteinte à la personne humaine, d’une atteinte aux biens ou d’une infraction économique et financière
En conclusion, la responsabilité pénale des personnes morales est un concept fondamental du droit pénal français.